Le tabac, une culture pas du tout tabou !



Photo: Autonomie Jardin
NICOTIANA TABACUM
Famille : Solanacées(Tomates, poivrons, aubergines)
Type : Annuelle
Origine : Amérique centrale, et du sud
Couleur : Fleur rouge, rose, jaune, ou blanche
Multiplication :  Semis /Bouture(rarement)
Plantation : Printemps
Floraison :Juillet à septembre selon régions, et variétés
Hauteur:  1 m à 1,80 m

En tant que fumeur invétéré, j’ai fini par comprendre que la production personnelle de mon tabac est plus que rentable. Je me suis mis à sa culture récemment, suite aux hausses successives des taxes qui mettent le paquet de clope, à pas loin de 10Euros. J’ai donc décidé de ne pas attendre cette somme psychologiquement symbolique, qui arrivera bien vite. La hausse des substances chimiques, additifs, et autres saloperies ajoutées à un produit qui est déjà nocif en lui même, m’ont également poussé à vouloir fumer un tabac naturel, cultivé sans produits chimiques, et sur lequel je n’ajouterais jamais une goutte de quelque additif que ce soit. Pour les non-fumeurs, cette plante à également un intérêt ornemental exotique, mais s’avère être aussi un répulsif efficace sur pas mal de parasites du jardin. On peut en faire facilement un bio-insecticide au moins aussi redoutable que les produits à base de pyrèthre vendus à un prix prohibitif en jardinerie. On peut également l’utiliser en fumigation, une méthode antiparasitaire d’autrefois, qui depuis à été malheureusement remplacé par le tout chimique. Autonomie Jardin contribue à faire tomber le tabou hypocrite autour du tabac.

1 – Une plante prisée, mais aussi diabolisée

Le tabac fut introduit en Europe dès le début du 16ème siècle(1520) par les conquistadors de retour d’Amérique. Il fut longtemps réservé aux nobles, bien que son usage soit traditionnel, et populaire dans ces contrées Américaines d’origine. Désormais produit importé, le tabac devient dès lors un luxe. Les Amérindiens connaissaient les vertus antiparasitaires, mais aussi récréatives de cette plante, elle était également utilisée lors de leurs rituels religieux, ou lors des fêtes. Son coté addictif, provoqué par la nicotine, fera du tabac, au même titre que d’autres drogues, une marchandise qui rapportera beaucoup d’argent aux producteurs, mais surtout aux lobbys, et aux États qui en gèrent la distribution.

Suivant les modes et les époques, il est consommé de différentes manières. Plus souvent chiquer que fumer par les indigènes, il est au départ consommé logiquement de ces 2 façons. Pipes, puis cigares, mèneront peu à peu à la traditionnelle cigarette, que les gens ont longtemps roulées eux-même, avant que cette « corvée » ne soit mécanisée, et industrialisée. On commence alors à ajouter des additifs qui améliorent le goût, et rendent la fumée moins acre, et plus agréable à inhaler, augmentant ainsi du même coup, et le pouvoir addictif, et sa facilité de consommation. L’augmentation des cas de cancers du poumon aux états-unis durant le 20ème siècle, favoriseront un temps le retour de la chique, mais le tabac est également vendu sous forme de poudre à priser, autre manière ancestrale de le consommer. Les dégâts sur la dentition, et les sinus, finiront par enterrer rapidement ces façons de consommer dans les années 90. Diabolisée par la suite, cette drogue devenue industrielle, fait peur. Les gens reviennent progressivement à la roulée, qu’ils jugent plus économique, à juste titre, et à tort plus saine. Le tabac est quand même bourré d’additifs cancérigènes, et que dire de certaines feuilles à rouler !

La technologie ne nous rendant pas forcement plus lucide, il fut enfin imaginé de faire chauffer un liquide encore plus chimique, et qui n’a plus rien à voir avec le tabac, dans un dispositif électronique, pour en inhaler les vapeurs.

Sans danger nous disait-on ! D’entrée, avant même que des études puissent être menées, on déclara cette clopinette électronique très saine, et d’utilité publique. Moins de 20 ans après son lancement, la vapoteuse, après avoir fait un tabac chez les jeunes, est à son tour descendue en flèche par l’OMS. Les vapoteurs, crédules, ont sautés à pieds joints dans ce concept fumeux de fumer sans s’enfumer. Pendant des années tous ces consommateurs ont cru qu’ils ne courraient pas de danger. Ils ont été trompés, et les gouvernements sont complices d’avoir autorisé une telle absurdité, qui ne pouvait qu’être néfaste, au vu de la composition chimique du produit inhalé. Personne n’a rien voulu voir, même des médecins en on fait l’éloge, le comble du cynisme !

2 – Une plante savoureuse, mais toxique

Pour les vieux fumeurs, il est une évidence que le tabac présente une grande toxicité, et qu’il est dangereux pour la santé. Nous avons au moins eu cette « chance » d’être informés de la nocivité du produit que l’on consomme. Les vapoteurs, mais aussi des générations de fumeurs d’autrefois n’ont pas été avisés des risques sanitaires encourus. Au début du 20ème siècle, on trouvait des médecins qui préconisaient la consommation de tabac, impensable de nos jours !

Les composants dangereux du tabac sont la nicotine qui crée une forte dépendance, et le goudron produit naturellement par la combustion des feuilles. Ces deux composantes, ajoutées aux additifs douteux inhalés par la même occasion, font du tabac un produit très malsain. Aucune personne honnête ne peut prétendre le contraire.

Mon but ici n’est pas de présenter la consommation de tabac sous un jour favorable, mais pour qui n’arrive pas à décrocher, je suggérerait simplement le moindre mal. Il est important de rappeler que :

(a) Les cigarettes, et les tabacs industriels sont bourrés d’additifs, addictifs, et destructeurs. Les taux de nicotine sont souvent amplifiés pour provoquer plus d’accoutumance. Ce types de produits, en plus de coûter chers, produisent plus de goudron que la combustion d’un tabac naturel sans additifs. La production en monoculture chimique, et à grande échelle a un impact écologique très mauvais. Sa culture intensive est responsable de 5% de la déforestation, gardons ça à l’esprit quand nous allumons une tige.

(b)La vapoteuse après plusieurs années aux ban d’essai, avec pour cobaye le consommateur, a démontré que les microparticules qu’elle produit sont dangereuses pour la santé, en particulier pour les bronches, et les poumons. Le concept fumeux de la fumée sans fumée, et bonne pour la santé, s’envole donc…en fumée !

(c) La loi Française nous autorise à produire nous même, dans le cadre familiale sans objectif commercial, autant de plants de tabac que nécessaire pour notre usage personnel, et celui de nos proches. L’avantage du tabac produit maison, réside d’abord dans son mode de culture, si vous décidez (je le conseille) de vous passer des produits phytosanitaires chimiques, vous obtiendrez un produit plus fin, et surtout plus sain. Pas d’additifs, un taux de nicotine naturel et raisonnable(ce taux dépend des variétés), une moindre production de goudron à la combustion par rapport aux blondes commerciales. De plus votre tabac bio ne vous coûtera que le prix des graines la première année(3,40/paquet chez Kokopelli), et ça, financièrement, ça change tout !

Semences bon marché, culture facile et rapide. Une alternative au buraliste très rentable .
Photo: Autonomie Jardin

3 – Un pesticide, et répulsif naturel, facile à cultiver

Traditionnellement, les graines de tabac sont semées sous abri au début du mois de mars. Les plants sont replantés en pleine terre au mois de mai. Le tabac nécessite peu d’arrosage, 1 fois par semaine lorsqu’il est en pleine terre, 2 fois/ semaine en pot. On peut apporter un peu de compost à la plantation. En pot, on le plantera dans un mélange de terreau de compostage, ou horticole, et de terre de jardin(50/50).Le tabac apprécie le plein soleil, mais il donnera de bon résultat à mi-ombre. En juin, c’est-à-dire au début de la floraison la plante atteindra environ 1 mètre 80(1m en pot).

Les fleurs de couleurs variants du rose au blanc, et au jaune, sont parfumées. On utilise les fleurs en parfumerie pour ses qualités olfactives, mais elles peuvent être utilisées notamment dans la fabrication artisanale de biopesticide. Elles sont régulièrement coupées pour que les feuilles se développent bien, chaque pied en possède environ une vingtaine.

Lorsque les premières décolorations foliaires arrivent, elles indiquent le moment de la récolte au mois de juillet et d’août. Il faut pas mal d’attention, on ramasse au fur à mesure les feuilles qui jaunissent.

À la fin du mois d’août, laisser quelques pieds monter en fleurs, vous pourrez récupérez les semences fin septembre à début octobre. On peut aussi fin août, couper certains pieds en laissant quelques départs de pousse à la base du pied. Ainsi votre tabac refera des feuilles, puis de nouvelles fleurs durant l’automne.

Les feuilles sont séchées sous air chaud , sous serre, ou dans des séchoirs traditionnels. Il faut maintenir une certaine humidité ambiante durant le séchage, qui dure ainsi plus longtemps, mais en conservant tous les arômes. Elles peuvent être séchée au soleil, mais on obtiendra alors un tabac plus sec, et moins aromatique. Je recommande la variété Silk Leaf, qui produit de grandes feuilles très odorante, et à la fumée agréable.



Séchage traditionnel Photo : Pixabay.com
Les feuilles de tabac récoltées, sont séchées pour éliminer plus de 90 % de leur eau. Les tabacs en feuilles sont classés selon leur variété ou leur mode de séchage :
sun-cured, tabacs orientaux séchés au soleil ;
flue-cured, tabacs type Virginie séchés à l’air chaud ;
fire-cured, tabacs noirs type Kentucky séchés au feu ;
dark air-cured, tabacs noirs séchés à l’air naturel ;
light air-cured, tabacs clairs type White Burley séchés à l’air.
S’ensuit soit un stockage pour les tabacs fire-cured ou certains light air-cured, soit une fermentation pour favoriser la volatilisation de la nicotine et de l’ammoniac.

En association avec les plantes du potager, c’est le jackpot, il éloigne naturellement bon nombre de parasites, et en piège d’autres comme les pucerons, qui restent englués dans les feuilles collantes et meurent. Il suffit de frotter un peu les feuilles à la main lors de la récolte pour faire tomber ces pucerons secs.

4 – Décoction antiparasitaire, et fumigation

Les fleurs parfumées, peuvent être utilisées pour faire des bio-insecticides efficaces
Photo : Autonomie Jardin

Ajouter le tabac à votre arsenal préventif contre les ravageurs invasifs est une bonne solution. Il suffit de l’associer aux autres cultures.

En « offensif », on utilise les fleurs qui sont plus concentrées en principes actifs, les feuilles, moins concentrées, peuvent être utilisées, mais en quantité plus élevée.

-Dans 1 litre d’eau, laissez macérer le tabac(feuilles sèches 20g, ou fleurs fraîches20g), durant au moins 24 heures, dans l’idéal 48heures.

-Filtrez, ou retirez les feuilles, et versez dans un pulvérisateur. Bien mélanger le produit avant chaque application.

ATTENTION : Ce type de décoction est très toxique, protégez vos yeux, et évitez d’inhaler. Stockez le produit hors de la portée des enfants. Lavez vous les mains après manipulation.

Enfin, on n’utilise cette décoction qu’en cas de présence massive de nuisibles. Sa toxicité impacte un large spectre d’insectes, et autres animaux utiles. Parcimonie, et grande modération donc !

À titre préventif, la seule présence de cette plante dans vos massifs, et vos cultures potagères, évitera les infestations. Personnellement j’intègre même quelques feuilles par ci par là sous le paillage.

En serre, vous pouvez procéder par fumigation, il suffit d’amorcer un petit feu dans un seau en fer, assurez vous que rien ne puisse brûler à proximité, et ajoutez des feuilles de tabac sec.

Refermez la serre, puis laissez la serre s’enfumer complètement, vous ouvrez pour évacuer la fumée quelques heures plus tard. Rincez bien les vitres de la serre après la fumigation pour éviter que la suie ne s’incruste.

La variété Silk Leaf produit de grandes feuilles, et une floraison rose, et parfumée.
Photo : Autonomie Jardin

Fumer nuit gravement à votre santé, et à celle de votre entourage.

Ben MASON

Publié par Ben. Mason

Jardinier autonome, spécialisé en éco-jardinage, et en permaculture.

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13 commentaires

    1. Bonjour,
      J’ai moi aussi eu des retards dans les semis à cause du confinement. Il y a pas mal de choses que je n’ai pas faites cette saison. Pourvu qu’il n’y ait pas de confinement en avril prochain, et que les récoltes seront meilleurs l’an prochain.
      Je vous souhaite un beau dimanche

      Benjamin

      Aimé par 1 personne

  1. Effectivement on peut conserver les graines au frigo, certaines se gardent plusieurs années. Pour ma part je les conserve simplement dans une pièce fraîche, à l’abri de la lumière, et dans un sachet, ou une boite fermée hermétiquement. Cependant, attention à ce que les graines soient bien sèches avant de les conditionner en sachets, sinon il y a un risque de moisissure.
    Bon dimanche

    Benjamin

    Aimé par 1 personne

  2. Bonjour. Les tabacs traditionnels français que je fumais dans ma pipe ont disparu, ou bien on complètement changé depuis les ventes de la SEITA. Aujourd’hui, les tabacs des vieux paysans français sont fabriqués au Danemark par Mac Baren, et ils n’ont plu rien à voir avec ce qu’on fumait avant. Je vis au Québec, et je souhaiterais faire pousser ma propre production, mais je ne sais pas quelle est la graine exacte qu’il faut se procurer pour retrouver ces tabacs bruns, forts mais goûtus qu’on mettait dans nos pipes. Je pense que c’étaient des tabacs qu’on cultivait dans le Sud Ouest, vers Bergerac, où je suis passé quelque fois récemment. Il reste d’ailleurs dans le paysage, ces grands séchoirs magnifiques en bois/
    Votre description de la culture me paraît complète, jusqu’au séchage, et je sais où me procurer le petit appareil pour retrouver la coupe scaferlati des poilus de 14. Donc, je suis prêt à me lancer, aussitôt que vous aurez la bonté de m’orienter pour trouver les graines qui se rapprochent de ce que je cherche.
    mille merci(s).

    Aimé par 1 personne

    1. Bonjour Patrice, merci pour vos observations pertinentes.
      Il est vrai que le tabac commercialisé de nos jour est sans rapport avec celui qui était produit d’antan. C’est regrettable.
      Il est difficile de répondre à votre question concernant la variété de tabac que vous affectionniez jadis. Le tabac brun en général utilisé pour la pipe est le Burley, qui brule lentement, et possède un arôme puissant. La façon dont la feuille est séchée influence aussi beaucoup sur le goût final du produit, de plus il était déjà courant à l’époque de mélanger deux types de tabac pour obtenir certaines notes et nuances.
      J’espère que ces précisions vous aideront dans votre recherche. Vous pouvez essayer de consulter les descriptions des variétés proposées par le grainetier Bio français Kokopelli. Ce site propose de nombreuses variétés anciennes, et dont les semences seront reproductibles.
      https://kokopelli-semences.fr/fr/c/semences/medicinales-aromatiques-et-florales/annuelles/tabacs

      Cordialement
      Benjamin

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    1. Bonjour Katia, merci pour votre lecture et votre intérêt🙏.
      Si vos pousses sont encore très petites, il serait bon de les repiquer d’abord dans un godet, afin que les plantules se développent bien. Si il s’agit de jeunes plants qui ont déjà pris un développement correct( 2 à 3 paires de vraies feuilles), vous pouvez les planter en pleine terre en respectant un espace minimale de 40 cm entre chaque plantes. On peut évidemment les espacer davantage, tout est question de place.
      Je vous souhaite un bon week-end

      Ben

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  3. La nicotine n’est absolument pas un produit « bio » au sens dans lequel vous l’entendez, ce n’est pas parce qu’une molécule n’est pas produite de façon synthétique qu’elle est inoffensive. Au contraire, c’est un produit toxique à « forte dose » pour les animaux à sangs chauds dont l’homme fait partie (raison pour laquelle une classe de produits phytochimique fortement décriée a été développée, mais si vous la connaissez bien, je suis sûr que vous passez vos journées à cracher dessus, ce sont les neo-nicotinoïdes) et extrêmement toxique pour les animaux à sang froids. De part ce fait, elle présente les même risques en ce qui concerne les polinisateurs et le reste de la faune que la plupart des NNI.

    Produire votre tabac ne le rend pas inoffensif, bien au contraire. La combustion de ce dernier vous expose aux même substances qu’une cigarette classique avec une composition de fumée différente mais presque tout aussi toxique (des milliers d’hydrocarbures, du CO, des particules fines etc) peut-être que la apprêté de la fumée vous empêche de l’inhaler profondément ce qui diminue vos chances de cancer pulmonaire profond (le plus difficile à soigner) mais tout les autres effets néfastes restent présents, il faut aussi prendre en compte la production de goudrons plus importante si vous n’utilisez pas de filtres et donc un impact plus important sur la sphère ORL.

    En ce qui concerne la cigarette électronique, on sent bien que vous ne maîtrisez absolument pas le sujet. A usage normal (hormis chauffage excessif), aucune substance identifiée comme cancérigène n’est produite au du moins en proportions infime, pas même le propylène de glycol que la glycérine végétale que les aromes. Il subsiste un doute en ce qui concerne la toxicité liées à l’exposition chronique et à long terme des tissus du système respiratoire donc il y a actuellement un principe de précaution qui se met en place pour éviter les même erreurs que l’on a fait avec le tabac avec des mesures pas toujours justifiées mais il ne fait aucun doute en revanche que la vapeur est bien moins toxique que la fumée du tabac.

    Aimé par 1 personne

    1. C’est noté Monsieur le grand toxicologue. Moi je parle jardinage, et production de végétaux en tous genres. Je ne cherche pas à faire l’apologie du tabac, pas plus que je ne cherche à minimiser ces nombreux effets néfastes. Je n’en ai pas besoin puisque tout le monde sait que c’est redoutable pour la santé sans que je me sente obligé de ramener ma science.
      Je consent à laisser ici votre avis « d’expert », et votre pub pour la tige électronique, qui effectivement est un condensé de conneries
      Bien à vous cher Docteur la morale!

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