Après plus de dix ans de développement, un nouveau parc national vient de voir le jour en France. Situé entre la Bourgogne et la Champagne, le plateau de Langres devient le 8ème Parc National de France métropolitaine. 3 autres Parcs Nationaux sont situés dans les DOM-TOM.

Photo: Lepoint.fr
1 – L’issue de 10 années de travaux
Entre la Bourgogne et la Champagne, le onzième Parc National Français vient enfin de voir le jour, le 7 novembre 2019. Consacré aux forêts de feuillus de plaine et abritant de nombreux écosystèmes rares et anciens, le plateau de Langres est un parc « nouvelle génération » dont le développement a nécessité dix ans de travail. « Ce territoire est à la fois très représentatif des campagnes et des forêts françaises, et il est exceptionnel car 80% des arbres étaient déjà là à la Révolution », a expliqué Hervé Parmentier, directeur du Groupement d’intérêt public (GIP) chargé de mettre en place ce parc. La réserve abrite des hêtres, des chênes parfois pluricentenaires et de nombreuses espèces animales quasi disparues comme le chat sauvage et la cigogne noire. Des abbayes, d’anciennes forges et quelques vestiges archéologiques font également partie de ce patrimoine désormais protégé.
Le projet a été lancé en 2009 par François Fillon, alors Premier Ministre. Mais son ouverture a fait débat et les négociations se sont souvent avérées mouvementées, certains(es) chasseurs(ses) et agriculteurs(trices) y étant fermement opposés(es). « On a cherché le point d’équilibre » entre protection environnementale et activités humaines, « qui continueront d’être pratiquées mais seront encadrées », s’explique le directeur du GIP, qui a accepté de réduire la superficie du centre du parc pour n’y conserver que les zones ayant « un intérêt fort en termes de protection et un intérêt patrimonial ».
Le plateau de Langres s’étend donc sur 250 000 hectares et recouvre 127 communes, qui pourront décider de ne pas y adhérer, se privant peut-être de ressources financières. Et pour cause, une trentaine d’emplois directs devraient y être créés, et un budget de 3 à 3,5 millions d’euros sera bientôt débloqué. Une telle opération pourrait donc répondre à de nombreux problèmes économiques rencontrés dans la région, notamment grâce au développement de (l’éco-)tourisme, mais aura pour effet de morceler le parc national, du fait de la non-adhésion de nombreuses communes. Le plateau de Langres devenant le Parc National le plus proche de la région parisienne, ces activités économiques, et touristiques devraient s’y développer très rapidement. Pour un territoire, l’attribution de ce prestigieux label se traduit entre autre par l’attribution d’aides, subventions, soutiens techniques et exonérations fiscales pour certains engagements de gestion. Espace qualifié par une gestion conservatoire, sa gouvernance est assujettie à de fortes contraintes et interdictions qui sont fixées par le décret de création du Parc.
En 2007, le Grenelle Environnement a conclu sur la nécessité de compléter le réseau actuel par trois nouveaux Parcs, centrés sur des écosystèmes clés du patrimoine naturel français, actuellement peu représentés dans les Parcs Nationaux existants. Moyenne et haute montagne, forêts tropicales, milieux insulaires et côtiers… La forêt feuillue de plaine était jusqu’ici la grande absente du panel des Parcs Nationaux Français. Ainsi est né le projet de ce 11ème Parc National Français.
2 – Situation géographique, et écologique
Le Parc National de Forêts est situé à cheval sur les départements de la Côte-d’Or (21) et de la Haute-Marne (52), sa création est officielle depuis le 7 novembre 2019.
Les forêts, majoritairement feuillues, du 11e Parc National Français, sont représentatives des plateaux calcaires du quart nord-est de la France.

Image: Forêts-champagne-bourgogne.fr
Au carrefour des influences climatiques continentale et océanique, subissant des entrées méditerranéennes et alpines, elles comptent jusqu’à plus de quinze essences d’arbres par hectare, le hêtre étant la plus courante.
Également du fait de leur ancienneté et d’un boisement quasi-continu, elles abritent de nombreux milieux naturels : marais tufeux, pelouses calcaires, prairies, riches en espèces végétales parfois rares comme le Sabot de Vénus. Si les populations de cerf, chevreuil et sanglier sont très abondantes, on rencontre également des espèces remarquables comme le chat sauvage ou la cigogne noire.
L’eau est également très présente avec 694 kilomètres de cours d’eau, de nombreuses sources et zones humides, ces zones naturelles sensibles devraient être à l’avenir mieux protégée.

Photo : Chemindetraverse52.fr
Témoin privilégié des liens étroits entre l’homme et la nature depuis le Néolithique, la forêt recèle et protège de nombreux vestiges archéologiques et conserve l’empreinte du travail des moines au Moyen-âge, de l’exploitation agricole, forestière, hydraulique ou métallurgique à différentes époques. L’originalité un peu incongrue du projet de Parc National des Forêts de Champagne-Bourgogne réside dans la présence forte et durable de l’homme et de ses activités sur l’ensemble de son territoire, dont une importante filière forêt-bois.
Le Parc National des Forêts a pour ambition de concilier la préservation de ces patrimoines exceptionnels et le développement économique, social, touristique, et culturel(rien que ça !). Tous ces aspects me semblent difficiles à conjuguer, mais j’espère que tous les moyens seront mis en œuvre afin que l’environnement ne soit pas relégué au second plan.

Photo : Forêts-champagne-bourgogne.fr
Quelques chiffres :
- Zone d’étude du cœur : 76 622 ha
- Aire optimale d’adhésion : 241 781 ha
- Projet de réserve intégrale : 3100 ha
Avec ce 11ème Parc National, la France se dote d’une référence unique pour le suivi des effets du changement climatique sur les écosystèmes forestiers de plaine et le renforcement de la naturalité des forêts. Il est le fruit du travail des acteurs de ce territoire.
Élisabeth Borne, Ministre de la transition écologique et solidaire, a salué la naissance, par un décret publié au Journal Officiel, du Parc national de forêts en Champagne et en Bourgogne, action phare du Plan biodiversité.
« Le Parc national de forêts en Champagne et en Bourgogne vient de naître. Il devient notre 11ème parc national. Trésor de biodiversité, il sera, avec ses 241 000 hectares, l’un des plus grands espaces protégés de forêts d’Europe. Et une fierté pour le territoire ! » a-t’elle fièrement tweeté le 8 novembre 2019.
L’aboutissement de ce projet marque l’ambition Française de renforcer la protection des espaces naturels.
Le classement d’un territoire en Parc National lui confère une forte visibilité nationale et internationale, en reconnaît le caractère unique, et en fait un espace d’expérimentation et d’excellence.
Le chat sauvage d’Europe
Photo : Bonjournature.frLa cigogne noire
Photo : dbuysse.free.fr
A l’échéance des 15 premières années de mise en œuvre de sa Charte, le Parc National des Forêts abritera l’une des plus vastes surfaces de forêts de plaine en libre évolution en Europe, d’au moins 6 000 hectares de forêts, dont une réserve intégrale de 3 100 hectares qui sera créée dès 2020.
3 – Toujours les mêmes qui râlent !
Un « parc» est par définition un territoire circonscrit, dans lequel une charte va, à juste titre, imposer des règles et des zones d’exclusion. Celle-ci soulève par conséquent des interrogations, et des mécontentements auprès de certains acteurs économiques tels les agriculteurs, la filière d’exploitation de la pierre de Bourgogne, mais aussi les invétérés chasseurs :
- L’opposition la plus forte vient de certains agriculteurs qui possèdent des terres dans l’enceinte du parc et s’inquiètent de voir de nouvelles contraintes et normes supplémentaires, peser sur leur profession. Une partie du monde agricole adopte une position de méfiance et d’inquiétude parce qu’un Parc National porte avant tout l’image d’un outil environnemental et non économique.
- Pour la filière d’exploitation de la pierre de Bourgogne, qui doit répondre à une demande croissante en pierre sur des carrières ayant une durée de vie limitée, il « faut » sans-cesse trouver de nouveaux gisements. Le Parc National apparaît alors comme un obstacle pour accéder à certaines ressources et un frein pour de nouvelles prospections.
- Les chasseurs des départements concernés, sont aussi porteurs de mécontentements, et frustrations. En cause, toujours la charte actuelle, dans laquelle apparaît une liste d’animaux non-chassables, liste pour laquelle ils estiment ne pas avoir été consultés(heureusement). Les fédérations de chasseurs de Côte-d’Or et de Haute-Marne pointent également une éventuelle perte de la gestion cynégétique dans cette zone, qui serait alors assurée par la direction du Parc. Pascal Sécula, président de la Fédération des chasseurs de la Côte d’Or s’inquiète de cette possible exclusion qui amoindrirait leur poids sur les différentes mesures concernant la chasse.

Photo : Lyonne.fr
Je suis pour ma part très heureux que le pays prenne l’initiative de protéger des espaces naturels remarquables, et inestimables. Je suis cependant inquiet des concessions qui ont été faites aux acteurs économiques locaux, ainsi qu’aux chasseurs, qui à mon sens n’ont rien à faire au milieu d’un espace naturel protégé.
Conscient que sans de telles concessions le Parc ne se serait pas fait, je ferais donc contre mauvaise fortune bon cœur, mais je pense qu’il faudra être très vigilant quant aux activités humaines, et touristiques qui auront lieu au sein de ce nouveau patrimoine vert. Puissent les générations futures profiter longtemps de sa grande beauté.
Ben. MASON
ma commune fait partie du parc national et mon blog témoigne de la richesse ‘incroyable’ de ce territoire….richesse due au fait que cette zone quasi exclusivement rurale est très peu peuplée humainement parlant
aussi, c’est l’impact touristique qui me pose question, même si, effectivement, ça re-dynamiserait l’économie ………
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Bonjour Malyloup, merci pour votre passage, et votre mot. Vous avez beaucoup de chance de vivre dans ce cadre naturel et sauvage. Cela explique sûrement les belles photos publiées sur votre blog. C’est superbe.
Comme vous le souligné, l’économie, et l’écologie font rarement bon ménage, moi je vis dans une région défigurée par le tourisme(var littoral), c’est une vraie plaie pour l’environnement local, bien qu’économiquement les retombées soient importantes. C’est parfois difficile de concilier tolérance pour le visiteur, qui individuellement ne pose aucun problème, et préservation des écosystèmes locaux, notamment littoraux.
La Provence, avant le tourisme de masse, c’était le pays de Pagnol, avec calanques, garrigues et maquis, aujourd’hui on se croirait à Beverly-Hills, tout est bétonné, une vraie fête foraine dans laquelle on entend presque plus les cigales.
Quant aux plages, en été, quelle créature terrestre à part un vacancier citadin aurait envie d’y mettre les pieds? entre serviettes, parasols, transats, bruit, agitation, mégots et détritus! C’est le bordel.
On a beau dénoncer le problème, l’écologie est clairement sacrifiée sur l’autel économique. C’est moche!
Reste la sensibilisation du public au respect de la nature, surtout aux plus jeunes (les vieux c’est souvent trop tard), en espérant que les comportements et mentalités évoluent.
J’espère que votre magnifique décor ne sera pas lui aussi victime de sa beauté, et de son succès, et que des mesures scrupuleuses seront prises pour préserver cet endroit remarquable de notre patrimoine écologique.
Bonne journée à vous, et excellentes fêtes
Benjamin
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