Pour la septième année consécutive, le désormais très populaire black friday s’est déroulé cette semaine, et s’achève ce vendredi. L’objet de cet article est de s’interroger sur la pertinence d’une telle journée, devenue semaine, et dédiée à la consommation à outrance. Bien que je puisse comprendre l’engouement de mes concitoyens pour cette opération alléchante, est-ce bien raisonnable de se laisser pousser si facilement à la consommation ? À qui profite réellement cette semaine insensée ? Certainement pas à la santé de la planète, que de plus en plus de citoyens, notamment les plus jeunes, veulent pourtant protéger.

Faut-il vraiment toujours consommer plus pour exister ? Ou peut-on encore imaginer un vendredi vert, semaine durant laquelle on s’abstiendrait au contraire de tout achat superflu ?

Une opération commerciale entre frénésie et cohue
Photo : Agoravox.fr

1 – Un concept commercial typiquement américain

Débarqué dans l’hexagone en 2013, le black friday consistait alors en une journée(vendredi) de « bonnes affaires » en tous genre. Importé des États-Unis, où il connaissait déjà un franc succès, le concept m’a au début fait sourire. Je ne pensais pas qu’une opération commerciale comme celle-ci puisse avoir le même succès chez nous, car, du moins le croyais-je, nos habitudes de consommation ne sont pas les mêmes.

Le coup marketing a cependant tellement bien pris, que 75 % des Français sont aujourd’hui séduit par l’idée. Cette opération s’étale aujourd’hui sur quasi une semaine(du 25 au 29 novembre cette année).

Nos habitudes en matières de consommation changent, d’une part nous sommes toujours poussé à nous équiper de mille et une choses, qui, c’est certain, finiront bien par nous rendre heureux… D’autre part, les difficultés économiques, le salaire moyen qui ne vole pas haut, et stagne, font que nous sommes à l’affût de la moindre promo, ou ristourne pour nous mettre à niveau.

Mais à niveau de qui au juste ? De ceux qui réussissent le mieux bien sûr !

Les difficultés économiques, le salaire moyen qui ne vole pas haut, et stagne, font que nous sommes à l’affût de la moindre promo
Photo : Metro.co.uk

Les ménages à haut revenus ne se mettent pas dans la panade lorsqu’ils s’équipent, leurs revenus leur permettent ce luxe de s’offrir des objets qui leur facilitent grandement l’existence. À l’époque ces gens là s’offraient des domestiques(parfois encore de nos jours), aujourd’hui ils s’offrent des outils de pointes.

Si nous n’avons pas ces mêmes outils, nous sommes clairement désavantagés. Comment faire face si je n’ai ni voiture, ni ordinateur, ni tablette, ni électro-ménager pour me soulager des tâches quotidiennes ? Partant d’un tel principe, il est évident que tout le monde doit, désire, et cherche à s’équiper toujours plus, quel qu’en soit le prix. Nous voyons cela comme un investissement.

Sauf que pour le « petit peuple », auquel j’appartiens, l’investissement n’est souvent pas rentable. C’est à dire que l’on empreinte des sommes que notre petit salaire ne pourra jamais rembourser. En d’autre terme, nous jouons au riche, mais nous n’avons pas les reins de ceux-ci.

Je ne discute pas la légitimité de cette attitude, je dits simplement que lorsqu’un riche s’équipe, il obtient finalement que les avantages de l’objet, alors que l’achat du même objet par un citoyen lambda, génère de gros soucis pour le rembourser, la dette annule donc un peu les avantages. Bref, dans notre course à la croissance, et à la productivité, il n’est pas étonnant qu’une opération commerciale comme le black friday connaisse une si grande popularité.

Les gens, hystériques, perdent tous sens du discernement lorsque des opérations commerciales sont lancées. De vrais illuminés, ici, on dirait que le messi en personne va arriver !
Photo : Isa-conso.fr

2 – Discutable du point de vue éthique, et écologique

Si le black friday peut sembler une véritable aubaine, certaines associations de consommateurs dénoncent des « réductions trompeuses », et une technique commerciale agressive. Pour résumer on nous vend à -20 % ou -30 % des produits que l’on nous vend habituellement 30 ou 40 fois trop cher. Le commerçant ne perd rien, durant cette semaine de black friday, au contraire cela lui permet de déstocker. Déstocker pourquoi ? Bien souvent pour faire rentrer des nouveautés, qui rendront vite obsolète l’objet que vous vous êtes mis sur les bras. Les industriels ont toujours un coup d’avance, les dindons de la farce, juste avant les fêtes, c’est nous. Éthiquement, et en toute objectivité, je constate que la quasi totalité des offres proposées, qu’elles soient honnêtes ou pas, concerne des produits, services, et objets qui ne constituent pas des nécessités vitales, et / ou fondamentales. De l’électro-ménager, au cosmétiques, en passant par les propositions de crédits bancaires « avantageux », quasi tous les secteurs proposent des offres. Mais alors pourquoi pas de black friday, pour l’eau, l’électricité, la nourriture, le loyer, et soyons fou, l’essence que l’on nous vend toute l’année au prix du sang ? Pas de black friday chez Total et BP, pas plus qu’au trésor public. Il est en outre évident qu ‘un tel concept pousse les ménages les plus en difficultés à s’endetter encore d’avantage avec des achats compulsifs, qui bien souvent généreront d’autres dépenses, en plus d’accentuer le déficit.

Le black friday se heurte à des contestations militantes en hausse, notamment pour des raisons environnementales
Photo : Lactu.fr

D’un point de vue environnemental, celui qui m’intéresse, et me préoccupe le plus, un seul mot me viens ; INSENSÉ

En effet, au vu de la situation écologique actuelle, et de la très médiatisée urgence climatique, nous savons à peu près tous, sauf mauvaise foi, que notre consommation doit changer de tendance. Nous devons impérativement être plus responsables, et raisonnés dans nos choix et habitudes de consommation, pour ainsi espérer un avenir plus engageant pour les jeunes, et les générations à venir.

En tant que citoyen écologiste, je ne peux que m’inscrire en faux face à une opération commerciale aussi irresponsable, de la part de dirigeants d’entreprises qui par ailleurs jouent sur la corde sensible écologique, en faisant un peu de compensation carbone, et beaucoup de com pour nous assurer qu’ils sont écolos.

Ceci dit, mon attachement vis à vis des libertés individuelles de chacun, implique que je ne suis pas favorable à l’interdiction de cette pratique commerciale importée. Je suis de ceux qui sont convaincus que les gens sont capables de comprendre les choses, et de choisir par eux-même ce qui est bon pour eux. Parfois nous nous trompons, c’est humain et excusable, mais parfois ce sont les publicités qui nous trompent, et nous incitent, soyons donc très prudent.

Les yeux plus gros que le budget ! Nous ne sommes pas toujours raisonnables.
Photo : Francesoir.fr

3 – Un vendredi vert pour s’indigner

Ce vendredi est aussi, et avant tout, le jour d’une nouvelle marche des jeunes en faveur de la planète. Je préfère retenir ceci, et espère qu’ils seront bien plus nombreux dans les cortèges que dans les magasins.

Pour celles et ceux qui se sentent solidaires des aspirations légitimes des jeunes, et concernés par la sauvegarde de notre environnement, nous avons le pouvoir de décider de ne pas rentrer dans le jeu des commerçants, nous pouvons décider de ne pas effectuer d’achats en dehors du stricte nécessaire pour vivre durant la semaine en question. Les économies seront réelles, et non fantasmées sous l’illusion d’un rabais. Et pourquoi pas en profiter pour privilégier un peu plus les petits commerces de proximités, et les petits artisans locaux qui eux aussi doivent manger, passer de bonnes fêtes, et ne peuvent pas se permettre, d’un point de vue financier, de s’aligner sur le concept du black friday. Je rappelle à toutes fins utiles que des soldes ont lieu traditionnellement 2 fois par an, nous pouvons très bien choisir ces périodes pour acheter nos nécessités d’ordinaire les plus coûteuses.

Ce vendredi est aussi, et avant tout, le jour d’une nouvelle marche des jeunes en faveur de la planète.
Photo : Francebleu.fr

Enfin, pour conclure cet article quelque peu militant, le vendredi vert est aussi un moyen citoyen de reprendre notre réel pouvoir d’achat, qui ne réside pas tant dans le montant du salaire que dans notre capacité à choisir sans être influencé, quand et comment utiliser à bon escient le dit salaire. Ne pas se rendre dépendant d’objets qui ne sont pas indispensables à notre fonctionnement quotidien, constitue le pouvoir de résilience, qui est notre capacité à fonctionner avec le minimum nécessaire. Le pouvoir de résilience peu donc aussi venir compenser un faible pouvoir d’achat. La débrouillardise devient alors porteuse d’économie, en plus d’être bénéfique à la planète.

Ben. MASON

Publié par Ben. Mason

Jardinier autonome, spécialisé en éco-jardinage, et en permaculture.

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9 commentaires

  1. C’est vrai que l’on peut s’interroger sur la pertinence de ces jours d’hyper consommation; toutefois, si on remonte un peu dans le temps,il y a toujours eu des jours du même genre : « la quinzaine du blanc » « les soldes d’été », « les soldes d’hiver », « les foires expo », »les destockages ». La question reste toujours la même : Achetons nous ce que nous avons vraiment besoin ? ou ce qu’on veut nous vendre ? Si profiter de ces jours c’est simplement acheter quelque chose dont nous avons vraiment besoin et que nous avons attendu ce moment pour profiter d’un prix intéressant pourquoi pas ? Une fois qu’on a fait le tour de toutes les questions habituelles : Puis je réparer ce que j’ai déjà ? puis je me passer de cet article ? puis je l’acheter d’occasion , Puis je le fabriquer moi-même ? Me concernant, je fais peut cas de ces journées, mes achats se font de plus en plus d’occasion, je fabrique de plus en plus de choses. Mais parfois il faut bien se rendre à l’évidence on ne peut pas passer à coté de l’achat. Ce qui compte s’est de s’assurer que ce choix d’achat est bien le nôtre et pas celui des sollicitations commerciales permanentes. J’habite à la campagne et j’avoue que cette maitrise me semble plus simple qu’en habitant en ville ou là les sollicitations sont omniprésentes . Le principal, je pense, c’est d’être sûr que nous gardons bien la maitrise de nous mêmes et de nos actes de consommateurs tout en restant lucides car il faut bien se rendre à l’évidence, on n’a tous eu un jour un « petit moment de faiblesse » ou l’on s’est laissé tenter …Aller bonnes soldes ou bonne maitrise de soi 🙂

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    1. Je partage votre analyse, l’essentiel est de se poser les bonnes questions avant de consommer, privilégier le bricolage et la récup’, et savoir gérer suivant ses besoins indispensables. L’exercice n’est pas si simple pour tous, nombreux sont les acheteurs compulsifs(principalement citadins comme vous le soulignez), ceux-ci ne sont pas aidés par le black friday. L’opération en elle même n’est pas le problème, et s’apparente effectivement aux soldes, je déplore cependant une forte incitation à la consommation durant cette période commerciale. Vous avez raison, il faut savoir rester lucide. Merci pour votre lecture.
      Bien cordialement
      Benjamin

      Aimé par 2 personnes

      1. Je m’intéresse à votre blog car vous n’êtes pas intégriste dans votre démarche, vous avez des convictions, vous essayez d’être en accord avec mais êtes également ouvert aux contraintes qui nous entourent et acceptez parfois de trouver le meilleur compromis. Bravo pour votre blog et merci pour ces partages. A bientôt. Thierry

        Aimé par 1 personne

  2. Bonjour, tous les articles sur votre blog sont intéressants! Le black friday est une incitation à la consommation, je suis en accord avec vous et en plus s’ajoute un autre problème c’est l’obsolescence programmée, c’est un véritable fléau et une arnaque de la part des constructeurs! Je crois que l’UFC -Que Choisir lance un observatoire des pannes pour remonter les infos jusqu’aux constructeurs. Imaginez, les soldes, des semaines comme celle-ci, tout le matériel acheté pour une durée de vie réduite, c’est complètement paradoxal avec l’écologie! Il faut des sanctions maintenant. Personnellement, j’achète beaucoup dans les Trocantons, des petites associations pour des vêtements d’occasion mais en très bon état! Il faut fouiner et on arrive à trouver son bonheur pour pas cher! Voilà ma contribution pour votre billet! Bonne soirée ツ

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    1. Merci Stéphane pour votre lecture, « Ufc que choisir? » fait effectivement partie des associations de consommateurs qui ont donné l’alerte, et surveille l’opération de très près. Je ne suis pas favorable aux sanctions car je pense que par la sensibilisation, les gens se braquent moins, ce qui leur donne une réelle occasion de réfléchir au fond des choses. Des sanctions sembleraient injustes, et seraient vécues comme telles par une majorité de gens, et de commerçants. Il faut en revanche en parler, notamment aux plus jeunes, afin de leur ouvrir les yeux sur la folie d’un consumérisme excessif. Vous avez raison de soulignez l’obsolescence programmée qui effectivement amplifie le fléau de la surconsommation. Bravo en tout cas pour votre démarche responsable d’achat via les associations, et trocantons, ces modes de consommation sont à encourager, et à développer.
      J’en profite au passage pour vous féliciter de vos superbes photos, il y a beaucoup d’originalité dans vos œuvres, j’apprécie votre talent.
      Merci pour ces partages
      Bonne journée, et agréable Week-end
      Benjamin

      Aimé par 1 personne

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