Ornementales chez nous
Problématiques ailleurs
Originaire du bassin amazonien, la jacinthe d’eau a été introduite dans la plupart des pays chauds comme plante d’ornement. C’est devenu un véritable fléau en Afrique de l’ouest, Indonésie, Australie, et en Floride. Cette plante flottante peut mesurer de quelques centimètres à un mètre de haut, sur une épaisseur de 2 mètres de large.

Photo : Visioflora.com
1 – description botanique
La jacinthe d’eau flotte à la surface de l’eau avec ses feuilles persistantes, vert vif, de 10 à 20cm de diamètre, charnues, brillantes, ovales dont les pétioles courts et renflés servent de flotteurs. Les racines rougeâtres à violet foncé forment un ensemble plumeux très long qui s’étend sous l’eau où les alevins trouvent refuge.
Tout son intérêt ornemental réside dans ses fleurs bleu lavande regroupées en épis d’une dizaine de centimètres de haut : elles comptent 6 pétales dont l’un porte une tache jaune centrale. Les graines produites par les fleurs sont très nombreuses et, en plus, ont une durée de germination potentiellement très longue.

Famille : Pontédériacées
Type : vivace aquatique
Origine : Amérique du Sud
Couleur : fleurs bleues
Multiplication : Semis ou boutures
Plantation : printemps
Floraison : juillet à octobre
Hauteur : 30 à 60 cm
2 – plantation et entretien
La jacinthe d’eau se cultive dans une eau douce (plante de rivière) riche en azote, qui ne doit pas s’écarter de la fourchette 12 à 32°C, sachant qu’elle croit le mieux entre 21 et 28°C, avec un pH entre 5 et 7,5. Elle apprécie une exposition ensoleillée mais tolérera la mi-ombre, voire l’ombre en climat méditerranéen.
Les semis spontanés participent à la multiplication de la jacinthe d’eau mais elle se propage surtout par division des stolons.
La plantation à la surface d’un bassin se fait, sous nos latitudes tempérées, au printemps, en mai, quand le gel n’est plus à craindre. Une à deux plantes par m² suffiront amplement en terme de densité de plantation.
Il est judicieux de placer la jacinthe d’eau dans un panier pour plantes aquatiques, cela vous permettra de l’hiverner plus facilement. L’hivernage se fait sous abri à 15°C minimum, en pleine lumière, dans des bacs emplis d’eau et de sable. dès le début de l’automne.
Si vous êtes en région méridionale aux hivers doux, surveillez son développement afin de ne pas vous laisser envahir ; si besoin, arrachez-en une partie que vous composterez. Veillez à ce qu’elle ne puisse pas proliférer dans la nature.
La jacinthe d’eau est particulièrement résistante. Pour limiter son expansion, la lutte biologique est utilisée avec le charançon marbré (Neochetina eichhorniae).
Photo: Naturetropicale.net Photo: Lejardindesanimaux.com
3- Utilisations ornementales, et phyto-épuratives
Déjà utilisée dans les stations d’épuration pour purifier l’eau, la jacinthe d’eau sert également de substrat et peut produire beaucoup de biomasse.
La jacinthe d’eau permet de dénitrifier l’eau d’un bassin sachant qu’elle a aussi un pouvoir dépolluant notamment sur des métaux comme le plomb. C’est donc une espèce intéressante dans le cadre d’une installation de phytoépuration. Lorsqu’elles sont extraites du bassin, les jacinthe en surnombres peuvent rejoindre le tas de compost.
La jacinthe d’eau possède d’autres vertus outre ses capacités à purifier l’eau. La plante entière peut être compostée pour servir d’engrais organique ou d’alimentation animale. Elle sert aussi à la production de biogaz par fermentation. Les racines de la jacinthe d’eau sont utilisées comme matière première pour la confection de meubles et d’objets artisanaux (malles, plateaux, panières).
C’est une plante qui se cultive en bassin de jardin, dans un panier pour plantes aquatiques : elle est particulièrement décorative mais en plus, elle offre un abri aux alevins. On pourra l’associer à d’autres plantes aquatiques, dérivantes ou non, comme laitues et châtaignes d’eau, nénuphars, lotus, joncs, iris d’eau, et autres végétaux de berges.
En l’absence de bassin, de grands bacs remplis d’eau peuvent convenir à sa culture dans de petits espaces tels que balcons, ou terrasses. On veillera simplement à rajouter régulièrement de l’eau fraîche, pour maintenir le niveau d’eau, et assurer une bonne oxygénation de celle-ci.
L’eau étant assez stagnante dans de tels bacs, une astuce consistera à placer une moustiquaire au-dessus du bac. Vous inciserez simplement aux endroits ou vous placerez vos jacinthes, afin que les racines passent au travers. Ce procédé empêchera les moustiques de venir pondre dans vos bac. Si l’on a quelques économies, on pourra placer au fond du bac une petite pompe (un bulleur) qui oxygénera l’eau, et l’empêchera d’être complètement stagnante. Dans le même esprit, une petite fontaine en circuit fermé, évitera aussi les désagréments, et conférera une ambiance apaisante à votre « zone aquatique ».
Photo : Forum-jardin.com Photo : Pinterest.fr
4 – Problématiques sociale, économique, et écologique
Le problème réside dans l’exponentielle prolifération de la jacinthe aquatique : elle double sa surface en 8 à 15 jours. Cette croissance rapide et les modifications des écosystèmes qu’elle génère sont problématiques. Elle est devenue un fléau pour les étendues d’eau douce, les rivières et les lacs des tropiques où elle s’est acclimatée, et naturalisée.
Un triste exemple avec l’asphyxie du lac Tchad :
La jacinthe d’eau a été importée en 1989 sur le lac Tchad. 5 ans plus tard, elle recouvrait pas moins de 80% de sa surface. Pour les pêcheurs, c’est une vraie plaie. Il y a les lignes et filets qui se prennent dans les racines, mais surtout, l’eau devient plus chaude et s’appauvrit en oxygène, tuant ainsi les poissons. Les pêcheurs se plaignent aussi des attaques répétées de crocodiles et de serpents qui profitent de cette biomasse pour s’embusquer.
Cette invasive est source de nombreux problèmes : elle bloque les voies d’eau et les ports, et paralyse les barrages hydrauliques. En s’introduisant dans les turbines, elle provoque des interruptions de production. Le barrage du Kariba (à la frontière entre la Zambie et le Zimbabwe), qui fournit en électricité la ville d’Harare (capitale du Zimbabwe) en est directement impacté. Un projet sur le lac Victoria est lui aussi en suspens.

Photo : Centredejardinbrossard.com
La jacinthe d’eau provoque aussi des inondations : la couverture végétale est si dense à certains endroits que l’on peut marcher dessus sans s’enfoncer. Elle forme une sorte de barrage qui obstrue les rivières.
Au lac Tchad, de nombreuses maladies ont accompagné l’arrivée de la jacinthe d’eau. La schistosomiase provient par exemple des escargots qui pondent sur les feuilles. La malaria se développe grâce aux moustiques qui pondent dans les eaux stagnantes. En empêchant les autres plantes de respirer, elle entraîne un pourrissement végétal qui infecte l’eau potable.
Mais c’est pas fini : d’après plusieurs études, l’évapotranspiration serait quasiment 2 fois plus élevée(1,8 fois) en présence de la jacinthe d’eau. Le débit du Nil au lac Victoria serait ainsi réduit d’un dixième à cause de cette plante. Enfin, elle semble être responsable d’une nette réduction de la biodiversité dans les régions tropicales qu’elle colonise.
5 – La lutte est compliquée
Plusieurs espèces d’insectes ou de champignons sont identifiés comme prédateurs de la jacinthe d’eau. Une des plus efficaces est le charançon, un petit parasite qui fait des trous dans les feuilles de la plante. Ces dernières s’enfoncent alors dans l’eau, captent donc moins de lumière, et finissent par mourir. De plus, les larves empêchent les jacinthes de respirer en colonisant ses racines. Mais cette méthode peut prendre longtemps.
La lutte chimique a donc été la première méthode utilisée. L’application d’herbicides est efficace sur des petites surfaces, mais elle est impuissante face à une prolifération excessive. De plus, le glyphosate est très toxique, il présente un danger pour les sols, les nappes phréatiques, et bien sûr, pour les personnes qui s’approvisionnent en eau potable au lac.

Photo : Youtube
Reste la récolte manuelle : des bateaux ratissent la surface de l’eau. La jacinthe d’eau peut atteindre des densités incroyables : jusqu’à 50 kg par m² . Une fois débarrassées de toute leur eau, les feuilles récoltées peuvent servir de fibre pour fabriquer du tissu ou du papier. Elles fournissent aussi un apport important de biomasse, et en Asie du Sud on les utilise aussi pour nourrir le bétail. Mais cette méthode est coûteuse (il faut transporter les énormes masses de feuilles par camion), et dangereuse (morsures de serpents, attaques de crocodiles ou d’hippopotames).
Ben. MASON
Cet article m’a aimablement été suggéré par Elienad, abonnée, et soutien actif du Blog Autonomie Jardin.
Un grand merci à elle pour sa généreuse contribution, et sa participation.
Merci, Benjamin, pour cet article sur la jacinthe d’eau que je vous avais effectivement suggéré. Très intéressant et bien documenté comme toujours. Voir comment une aussi jolie fleur peut être un plaisir pour l’ oeil , fournir de la matière première aux populations autochtones et , en même temps; être aussi un fléau dont il est difficile d’enrayer la prolifération, est captivant.. C’est ,sans doute, souvent le cas dans la nature. Bon Week end à vous et au prochain article.
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