La redoutable bactérie du xylème

(xylella fastidiosa)

Vieux oliviers agonisants par la xylella fastidiosa
Photo : Global-geography.org

La bactérie Xylella fastidiosa, transmise et véhiculée par des insectes vecteurs, s’attaque à un très large éventail de végétaux : vignes, oliviers, arbres fruitiers (Prunus), agrumes, caféiers, chênes, luzerne, etc. La gravité de ses impacts varie selon la souche, le végétal et l’écosystème concerné.

La redoutable bactérie du xylème, Xylella fastidiosa, empêche la plante de s’alimenter en gênant la circulation de la sèvre brute. Les symptômes de ses manifestations sont peu spécifiques (flétrissement, brûlures foliaires) et rendent difficile sa détection. Avec l’arrivée imminente du printemps, et son corollaire de ravageurs piqueurs de sève, redoublons donc de vigilance face à xylella fastidiosa.

1 – Description, et mode de transmission

Xylella fastidiosa est une espèce de protéobactéries Gamma de la famille des Xanthomonadaceae. Xylella fastidiosa est la seule espèce du genre Xylella, et cinq sous-espèces sont décrites à ce jour, et ont été identifiées dans le monde : multiplex, pauca, sandyi, morus, et tashke. Chacune de ces sous-espèces présente un spectre de souches et de plantes hôtes bien spécifiques.

Aux États-Unis, la bactérie est connue comme l’agent de la maladie de Pierce qui a fortement touché les vignobles californiens à la fin du 19ème siècle. Elle est également responsable de la chlorose variéguée des agrumes au Brésil depuis fin 1988.

Depuis 2013, Xylella fastidiosa est responsable du complexe de dessèchement rapide de l’olivier (CoDiRO) en Italie (région des Pouilles). Depuis son introduction accidentelle en Europe, elle menace l’ensemble du pourtour méditerranéen.

En avril 2015, la France interdit l’importation de végétaux sensibles à la bactérie provenant des régions atteintes. Mais quelques jours plus tard la bactérie est identifiée au marché de Rungis sur un caféier ornemental originaire d’Amérique centrale, et quelques semaines plus tard cette mesure est abrogée. En juillet 2015, la bactérie est signalée à Propriano en Corse sur un polygale à feuilles de myrte (Polygala myrtifolia) planté en 2010, ainsi que sur des plants de genêts d’Espagne (Spartium junceum). La souche trouvée en Corse est identifiée comme appartenant à la sous-espèce multiplex, différente de celle pauca affectant les oliviers des Pouilles. Cet épisode prouve néanmoins que la bactérie xylella, fastidiosa ou pas, se promenait déjà en terre d’Europe bien avant son signalement de 2013 en Italie. Bref…

Début octobre 2015, sa présence est confirmée à Nice dans les Alpes-Maritimes.

D’autre part, la bactérie s’est aussi largement diffusée chez les jardiniers particuliers par le biais de plants d’origine italienne acquis en jardinerie entre 2013 et 2015 (voire antérieurement).

Infographie : Tv83.fr

Cette bactérie est véhiculée par certains insectes piqueurs-suceurs, tels que les cicadelles, entre autres. Une bonne cinquantaine d’espèces d’insectes piqueurs de nos régions ont déjà été identifiés comme vecteurs de la bactérie, mais nul ne sait si tous les insectes se nourrissant de sève peuvent véhiculer le mal.

La cicadelle est l’un des insectes piqueurs-suceurs qui peuvent véhiculer la bactérie d’une plante à l’autre
Photo: Wikipedia.org

De nombreuses recherches sont encore en cours sur cette plaie bactérienne peu connue puisqu’elle nous affecte depuis seulement une petite décennie. Patience, et vigilance donc !

2 – Symptômes caractéristiques

Les symptômes de Xylella fastidiosa n’étant pas caractéristiques, des plantes a priori symptomatiques (brulures foliaires, dessèchements) peuvent être saines. A l’inverse, des plantes sans symptômes peuvent être très contaminées (cas notamment des caféiers et de certaines espèces de plantes ornementales).

Xylella fastidiosa sur polygales à feuilles de myrte
Photo : agriculture.gouv.fr

Par ailleurs, le risque de confusion avec d’autres causes d’origine biotique ou abiotique (champignons pathogènes, carences, stress hydriques, etc.) est élevé.

Différents types de symptômes peuvent être observés. Je vous indique ici les plus couramment remarqués :

  • Brûlures foliaires et, dans les stades les plus avancés, le dessèchement des rameaux (notamment dans le houppier des arbres), suivis de la mort de la plante dans les cas les plus graves (polygale à feuilles de myrte, laurier-rose, olivier, amandier, …). Il s’agit là des symptomes les plus courants concernant Xylella Fastidiosa ;
  • Chloroses foliaires (sur caféier, oranger) ;
  • Des défauts de lignification (aoûtement) et la persistance des pétioles après la chute des feuilles ;
  • Nanisme, accompagné d’une coloration bleu-vert des feuilles (luzerne);
  • Un port tombant et la réduction des entre-nœuds (pêcher et prunus) ;
  • Jaunissements et des rougissements des feuilles (sur les vignobles californiens).
Dégâts sur olivier
Photo : Vidarural.pt

3 – Végétaux infectés

La bactérie s’attaque à un très grand nombre de végétaux et la gravité de ses impacts varie selon la souche, le végétal et l’écosystème concernés. Au total, ce sont 563 espèces potentiellement hôtes de Xylella fastidiosa qui ont été recensées dans le monde (selon EFSA, en 2019).

Sur la base de cette liste établie par l’EFSA, la Commission européenne a retenu une liste d’environs 200 espèces de végétaux sensibles à Xylella fastidiosa. En particulier, elle a établit des listes de végétaux spécifiés qui correspondent aux plantes sensibles à des sous-espèces données.

Voici ici une liste des végétaux les plus fréquemment concernés par Xylella fastidiosa :

Xylella sur lavande grise
Photo : Esv.fr
Ici sur polygalla myrtifolia en 2015
Photo : Jardiner-autrement.fr

4 – Traitements préventifs

Il a été constaté au Brésil (en 2002) que les citronniers moins malades ou apparemment résistants, présentaient des feuilles colonisées par une autre bactérie : Curtobacterium flaccumfaciens, qui pourrait éventuellement freiner le développement de X. Fastidiosa.

Cependant, il n’existe à ce jour aucun traitement certifié, biologique ou pas, qui soit en mesure de lutter contre cette saloperie bactérie.

Malgré cette absence de solution curative, nous pouvons néanmoins nous montrer vigilants, et ainsi prévenir l’apparition, et la propagation de cette terrible plaie au jardin :

  1. Vérifiez systématiquement les plants acquis en jardinerie, assurez vous qu’ils ne présentent aucun symptômes.
  2. Privilégiez les nombreuses associations de cultures, cette pratique permettra de déboussoler un peu les insectes vecteurs de xylella.
  3. Dans la même optique, favorisez une belle biodiversité sur votre parcelle afin que les principaux insectes vecteurs puissent être régulés.
  4. L’installation de pièges à phéromones, et ou d’insectes auxiliaires sont aussi des pratiques qui permettront de limiter les parasites qui transmettent la bactérie.
  5. En cas de doute, supprimez uniquement les parties abîmées dans un premier temps, puis attendez une semaine et regardez si les symptômes reprennent. Si tel est le cas, il faudra procéder à la destruction du végétal infecté.
Photo: Giardinaggio.it

5 – Destruction des plants infectés

Depuis quelques années xylella fastidiosa fait l’objet d’un plan d’action national en France, et tout nouveau foyer doit être en principe déclaré au ministère de l’agriculture.

En outre, il vous faut procéder à la destruction des végétaux contaminés, qu’il vous faudra brûler, ou faire débarrasser par les services environnement de votre commune, en leur spécifiant le problème.

Je sais que suivant les dimensions, l’âge vénérable, ou la valeur sentimentale que l’on puisse concéder à un bel arbre du jardin, il n’est pas toujours évident de se résoudre à abattre un vieux sujet. Cependant, c’est un mal nécessaire si l’on veut pouvoir ralentir un peu la progression de cette redoutable bactérie importée. Ne tardez donc pas, en cas de suspicion à faire évaluer la situation par un jardinier compétent.

Photo: xfactorsproject.eu

Je vous souhaite un sympathique week-end, un beau début de printemps, et un jardin en pleine santé !

Ben. MASON

LE DICTON DU JARDINIER :

« Jamais pluie de printemps,

n’a passé pour mauvais temps. »

⛅🌦🌧⛅🌤

Proverbe du Gers

Publié par Ben. Mason

Jardinier autonome, spécialisé en éco-jardinage, et en permaculture.

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7 commentaires

    1. Salut Alan, merci pour ton mot et ta question compliquée.
      Je pense à titre personnel, que virus et bactéries ont toujours existés, bien qu’ils aient souvent mauvaise presse il en existe également qui sont utiles et bénéfiques aux organismes vivants. Il me semble que les micro-organismes qui se montrent parasites, et destructeurs ont aussi une raison d’être, et je suis convaincu qu’ils ont une fonction régulatrice des espèces.
      En d’autres termes, lorsque la population d’une espèce donnée atteint une trop grande densité, les virus et bactéries trouvent des conditions favorables à leur prolifération.
      Il y a aussi la main de l’homme qui contribue certainement à diffuser ces agents pathogènes. De la même manière que les européens ont introduit la grippe et la variole en Amérique, il y a concernant les végétaux, des organismes destructeurs qui ont été importés en Europe par le biais de plantes exotiques infectées. Nos insectes locaux diffusent ensuite malgré eux ces maladies à d’autres espèces végétales.
      Enfin, la baisse de la biodiversité, ainsi que les grandes monocultures favorisent aussi l’apparition des problèmes phytosanitaires.

      Je te souhaite un beau week-end

      Ben

      J’aime

      1. Merci Ben pour ta réponse détaillée. Question complexe, réponse complexe. Ce qui est sûr c’est que la baisse de la biodiversité et les monocultures amplifient le phénomène. Je ne sais pas si tu connais les prophéties du nil. Une catastrophe dite naturelle qui a ravagé des cultures au temps de l’ancienne Égypte.
        Von week-end à toi
        Alan

        Aimé par 1 personne

      2. Salut Alan,
        Je ne sais pas si il s’agit de la même chose, mais je connais les 10 plaies d’Égypte. Ces dernières ont sans doute une réalité historique et scientifique, elles auraient pu être provoquées par l’explosion du volcan de Santorin en 1600 avant notre ère.
        J’ai trouvé cet article très intéressant sur WordPress à ce sujet: https://fildelhistoire.com/2019/01/17/les-dix-plaies-degypte-entre-legende-biblique-et-realites-scientifiques/
        Passes un beau dimanche

        Ben

        J’aime

    1. Bonjour Fuego,
      Les cicadelles sont fréquentes, notamment sur les oliviers, mais elles ne transmettent pas forcément la bactérie du xylème.
      Il faut surveiller l’état général de vos arbres, et vous assurer qu’ils ne présentent pas de signes de dessèchement anormal.
      Je vous souhaite un bon week-end

      Ben

      J’aime

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